De Ferrare à la France. Le parcours historique du Roland furieux (1516)

CR de l’article de Marco Dorigatti

 

Benvenuto CELLINI, "François Ier, Roi de France", (1537), Cambridge, Fitzwilliam Museum (source : WGA).

Benvenuto CELLINI, "François Ier, Roi de France", (1537), Cambridge, Fitzwilliam Museum (source : WGA).

L’article très riche de Marco Dorigatti propose de retracer le « parcours historique du Roland Furieux » de Ferrare à la France. Il cherche donc, en particulier dans les incises et digressions, mais aussi dans les révisions et additions du poème, des traces de l’actualité politique mouvementée de l’Italie des années 1509-1516, en distinguant trois phases de rédaction, l’une associée à la figure du cardinal Hippolyte d’Este, la seconde, à celle d’Alphonse, la troisième, à celle de François Ier. Lors de la première période, l’Arioste commence (au plus tard en 1507) à écrire le Roland Furieux, sous l’œil attentif d’Hippolyte d’Este. À partir de 1509, l’actualité s’invite dans le récit, qui évoque, dans des prolepses, le bombardement de Padoue ou les affrontements entre Ferrare et Venise, en particulier la bataille de la Polesella, qui offre au poète l’occasion de faire l’éloge d’Hippolyte. La seconde étape, dite « période d’Alphonse », débute en 1510, en des temps très difficiles pour Ferrare qui, en tant qu’alliée de Louis XII, est menacée par la coalition formée contre la France par le pape Jules II et les États italiens : seule la mort du pape belliqueux, en 1513, sauvera la ville de la ruine. En cette période, le prince Alphonse d’Este est érigé au rang de figure mythique dans le Roland Furieux : le poète, par ailleurs détracteur des armes à feu, passe sous silence le rôle de l’artillerie dans les succès guerriers du prince, pour dépeindre celui-ci comme un chevalier invincible. Une troisième période s’ouvre avec le couronnement de François Ier, dont les victoires en Italie consolident la position de Ferrare. Le poème de l’Arioste salue comme un sauveur le vainqueur de Marignan, qui éclipse les prince d’Este en devenant l’incarnation du souverain libéral et chevaleresque. Ainsi, quoique l’Arioste situe l’intrigue de son poème dans des temps reculés, le Roland Furieux n’en reflète pas moins l’époque troublée de son écriture.

Compte-rendu fait par Alice Vintenon.