Présentation du livre “A Companion to Marguerite de Navarre” de Gary Ferguson et Mary B. McKinley (ed.)

"Portrait de Marguerite d’Angoulême", vers 1530, Bibliothèque Nationale, Paris (source : wga)

"Portrait de Marguerite d’Angoulême", vers 1530, Bibliothèque Nationale, Paris (source : wga)

Dans le cadre des « Jeudis V. L. Saulnier », en Sorbonne, à la Bibliothèque Ascoli, Gary FergusonJean-Marie Le Gall,Isabelle GarnierOlivier Milletet Isabelle Pantin ont présenté le 19 juin 2013 l’œuvre collectif intitulé “A Companion to Marguerite de Navarre”.

Ce livre qui sortira bientôt chez Brill (maison d’édition fondée à Leyde en 1683), rassemble les articles signés par des seiziémistes reconnus : Philip FordIsabelle GarnierJean-Marie Le GallGary Ferguson, Reinier LeushuisMary B. McKinleyJan Miernowski, Olivier MilletIsabelle Pantin, Jonathan A. Reid et Cynthia Skenazi, sous la direction de Gary Ferguson et Mary B. McKinley.

Gary Ferguson a présenté l’ouvrage sur cette femme de lettre, protectrice d’écrivains et d’artistes, sœur aînée du roi François Ier, qui couvre de son ombre majestueuse la vie intellectuelle de l’époque et pour laquelle l’intérêt ne cesse de grandir et s’exprimer. “A Companion to Marguerite de Navarre” se focalise sur ses écrits spirituels, poèmes et pièces de théâtre, interroge sa spiritualité et problématise son choix confessionnel, ainsi que son penchant pour le néo-platonisme, sans oublier L’Heptaméron auquelGary Ferguson et Mary B. McKinley ont consacré l’article final.

Tombe des rois de Navarre dans l'ancienne cathédrale de Lescar, où Marguerite est inhumée (source : wiki)

Tombe des rois de Navarre dans l'ancienne cathédrale de Lescar, où Marguerite est inhumée (source : wiki)

Au temps où les antagonismes religieux s’accroissent, la position de Marguerite de Navarre et laproblématique de sa religion intriguent les lecteurs ultérieurs : cela est thématisé dans les articles deJonathan A. Reid et de Jean-Marie Le Gall (“Marguerite de Navarre and Evangelical Reform” et “Marguerite de Navarre: the Reasons for Remaining Catholic”). À la probabilité d’une Marguerite luthérienne, Jean-Marie Le Gallrétorque qu’elle était disciple de Saint Paul et lectrice du Pseudo-Denys l’Aréopagite ; fidèle à l’unité de l’Église et à l’attachement à la hiérarchie ecclésiastique, Marguerite de Navarre ne pouvait pas ne pas être catholique – Le Miroir de l’Âme Pécheresse, par exemple, n’a jamais été mis à l’Index et ses contemporains n’ont pas jugé cela envisageable.

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"Marguerite de Navarre", ancienne attribution à F. Clouet, Chantilly, musée Condé (source : wiki)

Olivier Millet présente ensuite son article “Staging the Spiritual: The Biblical and Non-Biblical Plays” et explique la division provisoire entre les pièces dites bibliques et non-bibliques, dites profanes ou théâtre de l’actualité, et exprime la nécessité de dépasser la bipartition sévère de son corpus théâtral. L’Éternel, ce nom de Dieu qu’on retrouve chez Marot, Marguerite de Navarre l’adopte aussi. Le principe de la dramaturgie qui véhicule ses pièces, incarne le même univers dramaturgique – un univers hiérarchisé en hiérarchisant aussi bien les protagonistes sur la scène que le public. Ses dialogues sont faits à partir d’un type, mais elle distingue les personnages par certains traits et par leurs points de vue particuliers et ainsi les diversifie (pour que les personnages ne soient pas identiques ni schématiques, par exemple, comme si tous les sots dans une sotie ne devraient pas être tous pareils). Pour conclure, Olivier Milletsouligne que Marguerite de Navarre unit les univers spirituels qui nous semblent, dans notre perspective, contradictoires.

Isabelle Garnier et Isabelle Pantin ont évoqué Le Miroir de l’Âme Pécheresse et le second Miroir, c’est-à-dire Miroir de JésusChrist crucifié qui intériorisent la piété et la préparation à la mort. Beaucoup de titres à l’époque en latin et en français contiennent le mot miroir, néanmoins la critique a reconnu la complexité de la structure du Miroir de l’Âme Pécheresse, avec ses quatre métaphores : fille, mère, épouse et sœur. Robert Cottrell, dans une approche psychanalytique, nous rappelle Isabelle Garnier, a interprété Le Miroir et sa parole qui se tait comme des non-dits qui mènent vers le ravissement d’ordre paulinien (The Grammar of Silence: a reading of Marguerite de Navarre’s poetry, Catholic University of America Press, 1986). Isabelle Pantin poursuit en disant que le second Miroir, c’est-à-dire Miroir de Jésus-Christ crucifié est une contemplation du corps crucifié, vue comme une sorte de blason qui se caractérise par un réalisme puissant. Le retour vers lui, le dialogue avec ce corps, sert de miroir au pêcheur. Marguerite de Navarre avait assimilé comme deuxième langue la parole biblique qu’elle reprend avec une liberté et aisance étonnante. Cependant, ni chez saint Bernard ni saint Bonaventure ne se trouve pas une contemplation si développée. Le second Miroir est un texte qui mérite d’ouvrir le débat non sur la religion de Marguerite de Navarre, mais sur son génie poétique, sa force créatrice et sa manière exceptionnelle de rupture du ton, conclue Isabelle Pantin.

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"Miroir de l’âme pécheresse", A Alençon, chez Simon Du Bois, 1531 (source : wiki)

Autour d’un pot amical à l’honneur de la « reine de Navarre et ecrivainillvstre » se termine cette rencontre seiziémiste.

Compte-rendu par Ivana Velimirac, le 20 juin 2013. 

 

imageLa présentation de l’éditeur et la table des matières

Most widely read today as the author of the “Heptaméron”, Marguerite de Navarre (1492-1549) was known in her lifetime as a deeply religious, mystical poet. Sister of the King of France and wife of the King of Navarre, her deeds and writings expressed and sought to promote a living faith in Christ, based on the gospels, and a vision for the renewal and reform of the Church in line with the teachings of French Evangelicals such as Lefèvre d’Étaples, Guillaume Briçonnet, and Gérard Roussel. In this volume, eleven eminent scholars offer new appreciations of Marguerite’s extraordinary life and rich and diverse literary œuvre, including, in addition to her short-story collection, dialogues, mirror poems, plays, songs, and an allegorical prison narrative.

Contributors include, along with the editors, Philip FordIsabelle GarnierJean-Marie Le GallReinier LeushuisJan Miernowski,Olivier MilletIsabelle PantinJonathan A. Reid, and Cynthia Skenazi.

Table of contents

Notes on Contributors

Introduction by Gary Ferguson and Mary B. McKinley

Marguerite de Navarre and Evangelical Reform by Jonathan A. Reid

Marguerite de Navarre: the Reasons for Remaining Catholic by Jean-Marie Le Gall

Neo-Platonic Themes of Ascent in Marguerite de Navarre by Philip Ford

Opening and Closing Reflections: the Miroir de l’âme pécheresse and theMiroir de Jésus-Christ crucifié by Isabelle Garnier and Isabelle Pantin

Speaking with the Dead: Spirituality, Mourning, and Memory in the Dialogue en forme de vision nocturne and La Navire by Reinier Leushuis

Les Prisons’ Poetics of Conversion by Cynthia Skenazi

Chansons Spirituelles – Songs for a “Delightful Transformation” by Jan Miernowski

Staging the Spiritual: The Biblical and Non-Biblical Plays by Olivier Millet

The Heptaméron: Word, Spirit, World by Gary Ferguson and Mary B. McKinley

Bibliography

Index

Lien vers le site de l’éditeur Brill.

Richard Parkes Bonington, "François Ier et Marguerite de Navarre", 1827 (source : wiki)

Richard Parkes Bonington, "François Ier et Marguerite de Navarre", 1827 (source : wiki)