François Hotman. Un homme d’action, entre droit, histoire et théologie

  • Start date:
    22/10/2024, 00:00
  • End date:
    23/10/2024, 00:00
  • Venue:
    Genève

François Hotman

Un homme d’action, entre droit, histoire et théologie

Portrait funéraire de François Hotman, par Crispin (libre de droits - Wikipédia)

Portrait funéraire de François Hotman, par Crispin (libre de droits - Wikipédia)

Colloque à l’université de Genève, 21-22 novembre 2024

François Hotman (1524-1590) naissait il y a cinq cents ans. À cette occasion, il nous a semblé bon de lui consacrer un colloque international à Genève, les 21 et 22 novembre 2024. Jurisconsulte calviniste célèbre, pamphlétaire virulent et penseur politique qui fait désormais partie de la tradition philosophique européenne, Hotman demeure une figure que la recherche n’embrasse qu’à travers quelques œuvres majeures sans cesse lues et relues. En réalité, ses écrits d’humaniste et de juriste, sa correspondance internationale, ses connexions avec les théologiens protestants les plus importants du siècle, sa famille d’officiers ligueurs et royaux, sont autant d’objets d’étude qui appellent à re-problématiser notre interprétation de cette figure dominante de la pensée juridique calviniste.

Argumentaire

Il y a presque cinq cents ans naissait François Hotman (1524-1590). Cet homme issu de l’élite robine parisienne devint l’un des juristes les plus célèbres de son temps, l’équivalent calviniste de Jacques Cujas, alors même que son existence est marquée par le vagabondage académique, la ruineuse déshérence et l’exil permanent. Il demeura sa vie durant un sectateur dévoué de Calvin. Il fut l’ami proche de Théodore de Bèze, qui, à la mort du juriste en 1590, fit de lui un véritable « héros huguenot », l’appelant dans son hymne funèbre : HOTOMANUS MAGNUS. Il publia en 1573 ce qui a durablement été considéré comme la première formulation du constitutionalisme moderne, la Francogallia.

Les travaux sur Hotman peuvent à première vue sembler abondants. N’est-il pas l’un des rares jurisconsultes humanistes à avoir fait l’objet d’une biographie ? On doit à Donald Kelley d’avoir immortalisé pour l’historiographie un Hotman qu’avait déjà commencé à esquisser un siècle plus tôt Rodolphe Dareste : un homme politiquement hyperactif, dont le réseau couvrait une part remarquable de la République des Lettres, et à la plume vive voire incendiaire, en parfaite adéquation avec la violence des guerres de Religion. On a vu tour à tour en Hotman une figure de l’homme d’action révolté (John Salmon), un partisan du droit de résister (Robert von Friedeburg), voire un révolutionnaire lointain ancêtre de Rousseau (Jules Michelet). Et celui qui a fui à Genève en 1548 a fait du verbe un moyen efficace au service de la Cause huguenote (Myriam Yardéni), dont les écrits ont d’ailleurs circulé dans les assemblées protestantes en Europe (Janine Garrisson).

Mais où sont les travaux antiquaires et juridiques d’Hotman dans ces formules séduisantes ? Où sont les travaux d’édition humaniste ? Où est la critique du droit canon ? Où est l’effort intellectuel pour canaliser en une forme utile et applicable les découvertes successives de l’historicisme de l’école française du droit du XVIème siècle ? On connaît sans doute la voix du dénonciateur de la tyrannie qui a composé le Tigre en 1560 (Daniel Ménager), avant de soutenir la monarchie constitutionnelle (Paul-Alexis Mellet). On connaît peut-être aussi les vicissitudes d’une pensée de la résistance issue de l’Événement – après tout, Hotman a échappé de peu à la Saint-Barthélemy de Bourges (Ralph Giesey). Mais cette image d’Hotman, qui domine encore l’historiographie, est trop simple : fondée seulement sur la correspondance et quelques pamphlets du juriste humaniste, c’est celle d’un homme de plume sans véritable œuvre savante, plongé dans le seul activisme politique et religieux.

Cette tradition historiographique nous semble le parfait aiguillon pour un renouvellement des études hotmaniennes. C’est pourquoi nous organisons à Genève, en novembre 2024, un colloque international sur le grand jurisconsulte humaniste. Il nous semble pouvoir être articulé autour des thèmes suivants :

La vie, les réseaux, la famille d’Hotman

Comment le conflit d’Hotman avec son père, Pierre, s’est-il articulé ? Pourquoi François est-il demeuré une référence permanente pour son fils Jean, en dépit de l’esprit irénique de ce dernier (Mona Garloff) ? Jusqu’à quel point les relations entre les Hotman ligueurs (Antoine) et les Hotman calvinistes furent-elles rompues ? Quelle est la meilleure description possible pour le réseau d’Hotman : internationale protestante ou calviniste, république des lettres humanistes, corporation des jurisconsultes ?

Hotman et le droit

Quelle est la place d’Hotman dans le mouvement plus général du mos gallicus ? Quels furent ses rapports, notamment intellectuels, avec ses collègues à Bourges, comme Charles Dumoulin, avec ses anciens élèves, comme Étienne Pasquier, et avec ses concurrents, voire rivaux, comme François Baudouin et Jacques Cujas ? Dans quelle mesure peut-on dire qu’Hotman a été l’auteur d’une seule doctrine, ou au contraire un penseur labile et versatile, disposé à changer ses positions selon les circonstances (Sophie Nicholls) ? Quelle a été la réception d’Hotman et de son enseignement dans la suite de pensée juridique, notamment chez les jusnaturalistes et les tenants de l’Usus modernus Pandectarum ?

Hotman et la Réforme

Dans quel sens peut-on dire que la pensée juridique d’Hotman est à proprement parler réformée ? Reconnaît-on d’autres sources théologiques que Calvin et Théodore de Bèze dans ses écrits ecclésiologiques (De statu primitivae EcclesiaeBrutum fulmen) et dévotionnels (Consolatio e sacris litteris) ? Dans quelle mesure l’esprit de la Réforme irrigue-t-il ses écrits et son enseignement, comme l’ont suggéré ses contemporains ? Les réponses aux écrits hotmaniens (Papire Masson, Arnaud Sorbin, William Barclay) sont-elles simplement royalistes ou même spécifiquement catholiques et romaines ?

Hotman et l’histoire

Quelles sont les principales caractéristiques de la pratique antiquaire/historique d’Hotman ? Peut-on interpréter comme une œuvre d’historien les récits des événements des guerres civiles qu’il écrit tant pour le grand public (De furoribus Gallicis) que pour les princes d’Empire dont il est proche, comme Guillaume IV de Hesse-Cassel (Gerhard Menk) ? Ses écrits sont-ils de mauvaise foi et y ment-il éhontément, au nom du bien de la seule cause protestante ?

Hotman et la politique

Vu sa célébrité et au-delà des titres auliques (historiographe du roi, maître des requêtes, etc.), quels furent les rapports d’Hotman avec les cours des Valois et des Bourbons ? Étant donné son caractère semble-t-il universellement reconnu comme bouillant, a-t-il vraiment servi comme diplomate pour les huguenots auprès des princes d’Empire ? Peut-on mesurer l’efficacité de ses interventions ? Qu’est-ce que ce grand penseur des systèmes politiques a pensé des différents régimes qu’il a côtoyés durant sa vie vagabonde ?

Hotman et l’écriture pamphlétaire

Hotman a-t-il écrit d’authentiques pamphlets ? A-t-il sa vie durant été constamment le plus virulent des polémistes calvinistes de stature académique, sans aucune modulation de ton ? Peut-on lui attribuer d’autres pamphlets ? Y a-t-il un régime proprement hotmanien de la polémique ?

Ces axes ne sauraient évidemment couvrir de manière exhaustive l’ensemble des dimensions de la figure d’Hotman, qui méritent une reconsidération historiographique à l’aune du renouvellement des méthodes de l’histoire intellectuelle et culturelle ainsi que de la philologie ? Il s’agit là d’une orientation de départ des nouvelles recherches à entreprendre !

Modalités de contribution

Nous vous prions d’envoyer vos propositions de communication (titre + résumé d’environ 250 mots) à Christian Martens, à l’adresse e-mail suivante : christian.martens@unige.ch

avant le 27 novembre 2023.

Les communications pourront être tenues en français, anglais, allemand ou italien.

Organisateurs

  • Christian Martens (FNS, UNIGE/IHR, UWarwick/CSR)
  • Paul-Alexis Mellet (université de Genève/IHR)
  • Ingrid De Smet (UWarwick/CSR)