Le Lys recomposé. La représentation des pouvoirs sous l’Ancien Régime dans la littérature de fiction du XIXe siècle (1800-1850)

Le Lys recomposé. La représentation des pouvoirs sous l’Ancien Régime dans la littérature de fiction du xixe siècle (1800-1850)

Colloque organisé par Laurent Angard (IHRIM, Saint-Étienne), Guillaume Cousin (CÉRÉdI, Rouen) et Blandine Poirier (CÉRILAC, Paris 7)

Université Paris Diderot-Paris 7

14-15 mars 2018

Comité scientifique : Patrick Berthier (L’AMo, Nantes), Alexandre Dupilet, Hubert Heckmann (CÉRÉdI, Rouen), Florence Lotterie (CÉRILAC, Paris 7), Claude Millet (CÉRILAC, Paris 7), Claudine Poulouin (CÉRÉdI, Rouen), Gilbert Schrenck (CELAR, Strasbourg).

Lorsque Tocqueville publie L’Ancien Régime et la Révolution en 1856, il insiste sur la méconnaissance que ses contemporains ont de l’Ancien Régime. Si son ouvrage présente bien une nouvelle approche de cette époque, il est néanmoins impossible de considérer Tocqueville comme le découvreur « des opinions et des mœurs » d’une période qui imprègne la pratique du pouvoir mais aussi la littérature postrévolutionnaire. Dumas ne déclare-t-il pas, dans Les Compagnons de Jéhu (1847), « avoir, sur ces cinq siècles et demi, appris à la France autant d’histoire qu’aucun historien » ? Les liens entre littérature et Histoire n’ont en effet jamais été aussi forts qu’au xixe siècle : des scènes historiques au drame romantique en passant par la tragédie néoclassique ou le roman historique, c’est un « passé recomposé » (Claudie Bernard) que donnent à voir les ouvrages du temps.

La « poétique des morts » (Chateaubriand) qui sous-tend la littérature de la première moitié du xixe siècle ne consiste pas uniquement dans « le redoublement et la contre-épreuve de l’existence » (Vigny), mais aussi dans la résurrection de mondes où les êtres sont au cœur de luttes de pouvoir. Le premier roman historique français illustre ces profondes oppositions idéologiques mues par les « passions énergiques » (Mérimée) : Cinq-Mars n’est pas seulement l’histoire d’une conjuration manquée, c’est aussi l’analyse du basculement vers l’absolutisme de la monarchie française et de la faillite des grandes maisons. Bien souvent, les intrigues des œuvres qui prennent l’Ancien Régime pour cadre historique rendent compte, sur le plan symbolique, de confrontations politiques au sens où elles mettent en jeu l’organisation de la cité et la hiérarchie des groupes qui la constituent. La recomposition de la société française issue de la Révolution amène les hommes et les femmes du temps à interroger les forces en présence au prisme de l’Histoire, la fiction devenant à la fois lorgnon et miroir, medium translucide et spéculaire. C’est ainsi que pour Hugo, le drame idéal est « le passé ressuscité au profit du présent » (Marie Tudor).

Ce colloque interrogera les pouvoirs d’Ancien Régime dans sa conception la plus large (de Philippe VI, premier roi de la dynastie des Valois, à Louis XVI). Sous l’Ancien Régime, le pouvoir n’est pas seulement entre les mains du monarque : la noblesse, les membres de l’Église, les femmes, le peuple, l’armée peuvent également participer de la représentation des pouvoirs et des groupes qui les concentrent. Ce colloque a donc pour but de répondre à plusieurs questions : Quelle place occupe(nt) le(s) pouvoir(s) dans la représentation de l’Ancien Régime au xixe siècle ? Cette représentation participe-t-elle d’une image canonique ou bien est-elle une recomposition en acte de l’Histoire ? Dans quelle mesure la fiction littéraire historique permet-elle d’interroger la diversité des pouvoirs dans une perspective diachronique ? Enfin, quels sont les apports de la littérature de fiction à la construction scientifique de l’Ancien Régime ?

 

Les propositions de contribution pourront s’inscrire dans les axes suivants :

– Le pouvoir royal :

  • Figures de rois et de reines
  • Les sphères d’application du pouvoir royal
  • Force et faiblesse du roi/de la reine
  • Nature du pouvoir royal

– Pouvoirs et contre-pouvoirs

  • Organisation et hiérarchie des groupes sociaux selon leur puissance
  • Le poids de l’Église : pouvoir du clergé et de l’institution
  • Les pouvoirs secondaires ou inattendus
  • Les forces d’opposition : noblesse, parlements, peuple…
  • Le pouvoir des femmes

– Écrire et représenter le(s) pouvoir(s) d’Ancien Régime :

  • Récurrences thématiques
  • Évolution d’un thème précis
  • Stylistique : métaphore, symbole, discours… dénotant ou connotant le pouvoir
  • Mettre en scène les figures de pouvoir

– La fiction comme laboratoire historiographique :

  • Liens entre la tradition historiographique et les représentations au xixsiècle
  • L’écriture d’une autre Histoire
  • Les effets de sens du brouillage Histoire/fiction
  • Liens entre le genre choisi et le pouvoir représenté

 

Les projets de communications (titre et résumé de 3000 caractères maximum), assortis d’une courte biobibliographie, sont à adresser, avant le 25 septembre 2017 (date repoussée), à l’adresse électronique : colloque.lys.recompose@gmail.com

Les réponses du comité organisateur seront communiquées au début du mois d’octobre.

 

Bibliographie indicative :

Annales Benjamin Constant, n° 31-32, « Le groupe de Coppet et l’Histoire », Slatkine, 2007.

Arthur Stéphane, La Représentation du xvie siècle sur la scène romantique (1826-1842), thèse de doctorat en Littérature française, dirigée par Françoise Mélonio, Université Paris-Sorbonne Paris-IV, 2009.

Bernard Claudie, Le Passé recomposé. Le roman historique français du dix-neuvième siècle, Hachette Supérieur, coll. « Recherches Littéraires », 1996.

Bernard-Griffiths Simone, Glaudes Pierre et Vibert Bertrand (dir.), La Fabrique du Moyen Âge au xixe siècle. Représentations du Moyen Âge dans la culture et la littérature françaises du xixe siècle, Honoré Champion, coll. « Romantisme et Modernités », n° 94, 2006.

Claudon Francis, Encrevé André et Richer Laurence (dir.), L’Historiographie romantique, Éditions Bière, 2007.

Eidôlon, n° 101, « Le pouvoir et ses écritures », Denis Lopez (dir.), PU de Bordeaux, 2012.

Laplace-Claverie Hélène, Ledda Sylvain et Naugrette Florence, Le Théâtre français du xixe siècle. Histoire, textes choisis, mises en scène, L’avant-scène théâtre, coll. « Anthologie de L’avant-scène théâtre », 2008.

Mentzel Sophie, Trônes vacillants. La Représentation de la royauté sur la scène romantique (1820-1840), thèse de doctorat en Littérature française, dirigée par Patrick Berthier, Université de Nantes, 2016.

Thomas Catherine, Le Mythe du xviiie siècle au xixe siècle (1830-1860), Honoré Champion, coll. « Romantisme et Modernités », n° 70, 2003.

White Hayden, Metahistory. The Historical Imagination in 19th-Century Europe [1973], Baltimore, Johns Hopkins University Press, coll. « History/Literature », 2014.