Pierre Salvadori – A travers les brumes du Nord. La cartographie du Septentrion et ses pouvoirs à la Renaissance.

Cette section constitue la partie 12 de 14 du numéro
LE VERGER - Bouquet XII : Temps et espaces du voyage à la Renaissance

Pierre Salvadori (Université Paris-Sorbonne)

Gérard MERCATOR, "Svecia et Norvegia cum confiniis", (1607-1608), source : gallica.

Gérard MERCATOR, "Svecia et Norvegia cum confiniis", (1607-1608), source : gallica.

Ce n’est pas avant 1482 que la Scandinavie intègre véritablement la culture géographique des humanistes du cœur de l’Europe. De l’île antique de Scandia, les nouvelles cartes géographiques réalisée à partir du savoir ptoléméen la font passer à l’état d’immense péninsule au Nord de l’Europe avec la publication des premières tabulae modernae dans les éditions de la Geographia de Ptolémée imprimées à Ulm en 1482 et 1486. Ce changement de statut géographique n’a rien d’anodin et contribue avec force à intégrer politiquement et culturellement la Scandinavie au continent pour lequel elle semble devenir un “nouvel horizon” (G. Atkinson), et d’ailleurs sans doute son premier à la Renaissance. Petit à petit précisée cartographiquement des années 1480 à 1530, la Scandinavie finit par être présentée comme un nouveau monde, à tout le moins un autre monde (“alter orbis“) à investir. Il s’agira donc d’abord de revenir sur cet affleurement cartographique d’une immensité de nouvelles terres au Septentrion. Gagnant en puissance et en intérêt pour le continent, la Scandinavie se découvrait elle-même par la même occasion, grâce à l’œuvre géographique et historique des frères Johannes et Olaus Magnus, derniers archevêques catholiques d’Uppsala, exilés par la Réforme du roi de Suède Gustav Vasa à partir de 1527. La puissance de leur “écriture cartographique” (Tom Conley) est à l’origine du geste du successeur du premier des Vasas, Erik XIV, roi cartographe qui dessine, dans les années 1560, une carte du monde sur laquelle la Scandinavie est particulièrement mise en valeur. Après être revenu sur la signification de cet intérêt d’Erik XIV pour la cartographie, que l’on fera dialoguer avec la passion de Charles Quint pour les horloges, c’est la Carta Marina d’Olaus Magnus (1539) qui retiendra notre attention. Nous l’analyserons dans son rapport à une logique de Contre-Réforme et en tant que témoin de ce que peut être, aussi, une carte à la Renaissance, une carte qui est un langage du sacré, dont on tâchera de restituer le sensus spiritualis le plus profond.

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◀︎◀︎ Giovanna Devincenzo – Science, littérature et érudition à  Naples à  la fin du XVIe siècle, le cas de Giulio Cesare CapaccioL’hybridité des récits rabelaisiens. Etudes rabelaisiennes, LVI, éd. Diane Desrosiers, Claude La Charité, Christian Veilleux et Tristan Vigliano, Genève, Droz, 2017. ►►