Le De sensu de Charles de Bovelles (1511)

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Le De sensu de Charles de Bovelles (1511). Conception philosophique des sens et figuration de la pensée. Suivi du texte latin du De sensu, traduit et annotéÉdité et traduit par Anne-Hélène KLINGER-DOLLÉ, Droz, Travaux d’Humanisme et Renaissance, Genève, 888 p, 89 €

Souvent mentionné dans les études sur la Renaissance, Charles de Bovelles a néanmoins fait l’objet de peu d’études fouillées. Le présent ouvrage propose une large investigation dans une œuvre qui court sur toute la première moitié du XVIe siècle. Le prisme choisi est celui de la conception des sens élaborée dans le De sensu, publié en 1511 chez le grand imprimeur parisien Henri Estienne, conjointement avec le De sapiente – ce Livre du sage qui a fait redécouvrir Bovelles depuis les travaux d’Ernst Cassirer. Le De sensu s’avère une porte d’entrée privilégiée : au fil de l’étude, de nombreux échos se font jour entre tel petit traité pédagogique du jeune maître ès arts parisien, tels dialogues enjoués de sa vieillesse, la correspondance imprimée et manuscrite et ce De sensu où sont réhabilitées toutes les réalités sensibles dans l’aide qu’elles procurent à la connaissance et à sa transmission : parole, écriture, figures. A la lumière du De sensu s’éclaire en effet l’une des pratiques les plus continues de Charles de Bovelles : la présence, dans toute son œuvre, de gravures, diagrammes, schémas… Cette pensée, qui se soucie toujours des formes par lesquelles elle se donne à saisir, s’avère ainsi présenter maints points de rencontres avec des penseurs, poètes et pédagogues de l’humanisme italien et français, tels Geoffroy Tory ou Barthélemy Aneau. L’étude introduit à la lecture intégrale du texte latin du De sensu et de sa traduction annotée, qui donnent accès à une pièce importante, mais jusque-là peu abordable, d’une pensée de la Renaissance sur l’imagination et les cinq sens.

TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS

AVERTISSEMENT

INTRODUCTION

Bovelles : un champ de recherches bien vivant… mais encore largement en friche
La figure, la réflexion sur les sens et sur l’activité pédagogique comme pistes d’investigation d’une oeuvre multiforme
L’homme et l’oeuvre ?
Une famille noble de Picardie
L’entrée dans le cercle fabriste
Les premières oeuvres de Bovelles : des manuels fabristes ?
1511 : une année éditoriale exceptionnelle
1512-1515 : des publications régulières et fournies
1516-1520 : les raisons d’un silence éditorial complet
Les années 1520-1530, une reprise des publications contrariée par la censure
Les années 1540-1550 : des échos très fragmentaires de l’activité intellectuelle de Bovelles

PREMIÈRE PARTIE
BOVELLES ET LE CERCLE DE LEFÈVRE D’ETAPLES :
LA VOCATION PÉDAGOGIQUE DES HUMANISTES PARISIENS

CHAPITRE PREMIER : PORTRAITS DE LEFÈVRE, CLICHTOVE ET BOVELLES, TRIADE DE L’HUMANISME PARISIEN
Disciple de Lefèvre d’Etaples, mathématicien
Les fabristes, des philosophes appréciés pour leur élégance littéraire
Excellence de Bovelles dans la contemplation et l’invention spéculative
Le portrait d’un ascète socratique

CHAPITRE II : AFFINITÉS INTELLECTUELLES ENTRE LEFÈVRE D’ETAPLES ET CHARLES DE BOVELLES
Admiration de Lefèvre pour le jeune inventeur d’un « art des opposés »
Une ferveur partagée pour les arts libéraux, propédeutique à la philosophie
Maître et disciple, unis par une même passion « contemplative »

CHAPITRE III : UNE CORRESPONDANCE AMICALE ET INTELLECTUELLE ENTRE CONDISCIPLES DU COLLÈGE DU CARDINAL LEMOINE
Intérêts intellectuels et pédagogiques partagés par Josse Clichtove et Charles de Bovelles
L’écriture épistolaire, preuve et nourriture principale de l’amitié entre fabristes
L’amitié épistolaire et l’attrait des fabristes pour l’idéal contemplatif
Bovelles épistolier : le désir d’une écriture instructive et féconde

CHAPITRE IV : LA RÉPUTATION DE BOVELLES CHEZ SES CORRESPONDANTS
DE L’HUMANISME PARISIEN ET EUROPÉEN
Lettres échangées entre le cardinal Cisneros et Bovelles : désir de réforme et prophétisme
Les frères de Ganay et Guillaume Budé, destinataires des spéculations de Bovelles sur la symbolique des nombres et la valeur de l’analogie

CHAPITRE V : LES RAISONS ET L’AMPLEUR D’UNE « RUPTURE » AVEC LES FABRISTES : LA MARGINALISATION DE BOVELLES D’APRÈS SA CORRESPONDANCE MANUSCRITE
Les accusations de Bovelles contre Lefèvre, dans quelques lettres manuscrites
Une « rupture » véritable ?

DEUXIÈME PARTIE
UNE OEUVRE PÉDAGOGIQUE ?

CHAPITRE VI : L’ORGANISATION DES ARTS LIBÉRAUX. DE NOUVEAUX FONDEMENTS POUR UN IDÉAL ANCIEN
L’intérêt des fabristes pour la hiérarchisation des disciplines : l’Introductio de artium et scientiarum divisione de Josse Clichtove et le Libellus de constitutione et utilitate artium humanarum de Charles de Bovelles
Similitudes entre le Libellus de Bovelles et le Didascalicon d’Hugues de Saint-Victor : l’ambition de fonder philosophiquement un programme pédagogique
Des centres d’intérêts pédagogiques, mais une forme qui tient plus de l’oeuvre de pensée que du manuel universitaire

CHAPITRE VII : LES OEUVRES PHILOSOPHIQUES MAJEURES DE BOVELLES (1511) A LA LUMIÈRE DE LA PÉDAGOGIE FABRISTE
Des similitudes formelles évidentes
Un savoir d’accès aisé : tables introductives des notions et frontispices
Un recours simplifié – voire simplificateur – aux autorités
La valorisation des « disciplines humaines », comme voie d’accès aux « connaissances supérieures »
L’art des opposés : une méthode élaborée pour fonder la démarche « anagogique » des fabristes
Théorie de l’Ars oppositorum et application souple de la méthode des opposés dans les autres traités de 1511
Une pensée par oppositions, par propositions et démonstrations
L’unité du projet intellectuel et pédagogique dans la synthèse philosophique de 1511 : promouvoir l’activité intellectuelle de l’homme, accomplissement de la création

CHAPITRE VIII : CONTINUITÉ DE L’INTÉRÊT DE BOVELLES POUR
LA PÉDAGOGIE : UN DRUIDE PÉDAGOGUE DANS LE DIALOGUE DE ANIMÆ IMMORTALITATE
Le choix du genre du dialogue : raisons circonstancielles, précédents philosophiques et exaltation de la prisca theologia gauloise
Proximité avec les dialogues pédagogiques de Lefèvre d’Etaples
Les qualités pédagogiques du De Animæ immortalitate : gaîté et exigence du jeu (ludus)
Choix de la « raison » et recours aux autorités : la participation implicite de Bovelles au débat sur « l’endéléchie » et la valorisation de l’enthymème
A l’exemple des Anciens, un usage transcendant des mathématiques
Les figures, couronnement de la démonstration pédagogique
Le De Animæ immortalitate, une mise en scène enjouée des ambitions intellectuelles de Bovelles, philosophe-pédagogue

TROISIÈME PARTIE
UNE PHILOSOPHIE DES MÉDIATIONS SENSIBLES

CHAPITRE IX : LE DE SENSU, TRAITÉ FONDATEUR D’UNE OEUVRE ATTENTIVE AUX « MÉDIATIONS SENSIBLES »
Le De intellectu et le De sensu : un diptyque inaugural
De la connaissance de l’esprit humain dans le De intellectu et le De sensu à l’éthique du sage dans le De sapiente
Pensée analogique et écriture admirative dans le De sensu

CHAPITRE X : ANALYSE DU DE SENSU : DE LA RÉHABILITATION DES SENS A L’ÉLOGE DE LA PÉDAGOGIE
Absence de plan linéaire mais cohérence d’un cheminement
La sensibilité, medium (moyen intermédiaire) entre le macrocosme et le microcosme
La sensibilité, au plus bas degré de la hiérarchie des puissances de l’âme, mais dotée de la fonction de « signe »
Critères physiques, géométriques, métaphysiques et éthiques de la hiérarchisation des sens externes
Les sens inférieurs et le phénomène du sommeil : la perfection de la sensibilité humaine dans ses fonctions communes avec la sensibilité animale
Les sens supérieurs, ouïe et vue, en compétition
Le coeur du De sensu : la pédagogie, finalité des sens
Reprise de la généalogie mythique du savoir élaborée dans le Libellus sur les arts libéraux
Schématisation de l’accomplissement de l’âme, par la parole et l’écriture
Le maître et le disciple : un « couple d’opposés » au service de la perfection de l’homme
Places relatives du savoir intellectuel et des intermédiaires sensibles dans la pédagogie
Figures conclusives et valeur ambivalente du medium
Bovelles « néo-platonicien » ?

CHAPITRE XI : UN PROLONGEMENT DU DE SENSU : LE MYTHE DE L’INSPIRATION PHILOSOPHIQUE DANS LA CORRESPONDANCE MANUSCRITE DE BOVELLES (1526-1529)
Philosophe-poète, souffrances physiques et excellence d’une vocation
Le monde et Dieu pour seuls maîtres
Ecrivains-philosophes inspirés contre théologiens de métier

QUATRIÈME PARTIE
LA FIGURATION : UNE PÉDAGOGIE ET UNE DÉMARCHE DE PENSÉE

CHAPITRE XII : LES FIGURES CHEZ BOVELLES : UNE PRATIQUE TRADITIONNELLE AUX ENJEUX RENOUVELÉS

CHAPITRE XIII : FORMES ET PERMANENCE DES REPRÉSENTATIONS
FIGURÉES DANS L’OEUVRE DE BOVELLES
Présence exceptionnellement abondante des figures dans les traités philosophiques de 1511
Permanence du recours aux représentations figurées dans l’oeuvre de Bovelles
Les figures dans la correspondance imprimée de Bovelles :analogies et assurrections
Les oeuvres des années 1520-1530 : des figures moins nombreuses
Frontispices et figures conclusives : le rôle de la figure explicité dans les dialogues de 1551-1552
Finesse des figures des Geometries practiques

CHAPITRE XIV : FONCTION PÉDAGOGIQUE DES REPRÉSENTATIONS FIGURÉES
La figure, « médiation sensible » au même titre que l’écriture
La figure, un medium de l’enseignement aussi fiable que l’écriture
Ressources complémentaires du texte et de la figure
La représentation géométrique de la pédagogie chez Bovelles, source d’inspiration pour l’Alector de Barthélemy Aneau
La figure, soutien visuel de la mémoire
Quelques indices d’une démarche « combinatoire »
Les figures, source d’évidence intellectuelle, d’invention analogique et de plaisir : Bovelles et Geoffroy Tory

CHAPITRE XV : LE DE SAPIENTE : FORCE SPÉCULATIVE ET BONHEUR LITTÉRAIRE D’UNE PENSÉE FIGURÉE
La Sagesse au miroir : une ouverture monumentale
Sagesse philosophique, Sagesse biblique et grâces humanistes
Les vers du poète de Ferrare Ludovico Bigi Pittorio, au service d’une Sagesse savoureuse
Le De sapiente et l’invention de figures symboliques
La figure, l’image, et la définition métaphysique de l’être humain

CONCLUSION

ANNEXES
Annexe A : répertoire des dédicataires des oeuvres de Bovelles
Annexe B : table des correspondants de Bovelles (correspondance imprimée)
Annexe C : listes de notions
Annexe D : dénombrement des figures

DE SENSU
Epître dédicatoire : Charles de Bovelles de Saint-Quentin, au très vénérable Père Charles de Genlis, Eveque de Noyon
Livre des sens composé par Charles de Bovelles, de Saint-Quentin, pour le Révérend Père dans le Christ Charles de Genlis, Évêque de Noyon
I. Division des sens
II. Différences entre les sens externe et interne
III. Le sens interne est premier par sa nature, le sens externe premier par son opération
IV. Double regard de l’âme : droit et circulaire
V. La terre est à une extrémité du monde, le soleil en son milieu
VI. Division de l’imagination en imagination qui reçoit et en imagination qui juge
VII. Dénombrement général des puissances cognitives de l’esprit
VIII. Hiérarchie naturelle de ces cinq puissances cognitives
IX. Comparaison entre ces cinq puissances cognitives et les cinq zones ou régions de la terre
X. Les cinq sens externes sont le signe de ces cinq puissances cognitives
XI. Différences entre les sens externes
XII. Nature des trois types d’angles rectilignes – aigu, droit et obtus – qui se trouvent dans les sens
XIII. Les sens externes se répartissent en trois groupes : les uns relèvent de l’utile, d’autres de l’agréable, d’autres encore de l’honnête
XIV. Le plaisir et la peine sont les passions qui accompagnent la sensibilité des animaux
XV. Le toucher est le plus simple de tous les sens
XVI. De même que le sens de l’animal est double, interne et externe, de même son sommeil est double
XVII. Comparaison entre l’un et l’autre monde, le grand et le petit, en ce qui concerne chacun des deux sommeils et chacune des deux veilles
XVIII. Manière dont survient le sommeil véritable a la fois chez l’animal et dans le monde
XIX. Aucun songe ne survient pendant le sommeil véritable de l’animal
XX. Pendant le sommeil, la raison ne peut être liée et elle commande à l’imagination
XXI. Il existe un ciel au-dessus du firmament
XXII. Qualité successive et qualité permanente
XXIII. Quels sens sont plus parfaits que les autres
XXIV. Double manière d’apprendre
XXVI. [XXV.] Quelles médiations permettent a une intelligence de s’exprimer pour une autre intelligence et de procurer un savoir
XXVI. Les trois sphères dont l’âme est revêtue et enclose : sa sphère propre, la sphère du corps, la sphère du monde
XXVII. Parmi les quatre sphères de l’âme, les deux premières ne peuvent être séparées l’une de l’autre, les deux suivantes au contraire sont dissociables a la fois l’une de l’autre et des deux premières
XXVIII. De ces trois réalisations de l’âme dépendent les trois genres de vies de l’homme : contemplative, active, productive
XXIX. De même que la parole est le moyen intermédiaire de l’enseignement, de même l’écriture est celui de l’apprentissage
XXX. Ordre des actes de l’apprentissage
XXXI. Les sens du savoir sont au nombre de quatre
XXXII. Chez celui qui est enseigné, quel sens est mis en mouvement le premier
XXXIII. Combien il y a de façons de recevoir ou de transmettre un savoir
XXXIV. La vue est plus utile que l’ouïe pour permettre à la nature de nous enseigner
XXXV. Toute formation humaine est telle qu’elle va de l’intelligence a l’intelligence
XXXVI. Union de la sensibilité et de l’intellect dans le milieu, et différenciation de l’un et de l’autre dans les extrémités

BIBLIOGRAPHIE
1. Oeuvres de Charles de Bovelles
2. Sources anciennes
3. Ouvrages critiques

INDEX DES PERSONNES (AVANT 1800)
INDEX DES PERSONNES (APRÈS 1800)
INDEX DES NOMS DE LIEUX ET INSTITUTIONS
INDEX DES MATIÈRES ET NOTIONS
TABLE DES FIGURES