Séminaire Chorea : Le corps des femmes à la Renaissance

BALDUNG GRIEN, Hans Les sept âges de la femme, Huile sur bois, Museum der Bildenden Künste, Leipzig

BALDUNG GRIEN, Hans
Les sept âges de la femme,
Huile sur bois, Museum der Bildenden Künste, Leipzig

Sauf mention contraire, les séances ont lieu de 10h à 13h en salle Paul Hazard, 17 rue de la Sorbonne, 75006 Paris, (esc. C 2e étage, gauche). La participation est libre
Important : Suite aux récents événements, l’accès aux bâtiments de la Sorbonne est restreint. Toute personne ne disposant pas d’un accès étudiant ou enseignant aux locaux de la Sorbonne est priée de nous faire parvenir sa demande de participation au séminaire afin d’obtenir un laisser-passer nominatif, à l’adresse site.cornucopia@gmail.com

9 janvier, salle Paul Hazard

Le corps des femmes en religion

10h, Introduction

10h30, Stéphanie Chapuis-Després (docteure, Université Montpellier III): Etre une jeune fille dans le Saint-Empire romain germanique. Points de vue catholiques et luthériens sur le corps juvénile

11h30, Juliette Bertron (docteure, Université Paris-Est Marne la Vallée) : Madones et déesses parodiées
. Les modèles de la Renaissance dans l’œil des artistes féministes des années 1970

6 février, amphi Chasles

La laideur féminine

9h – Accueil des participants

9h15, Antoine Roullet (Fondation Thiers) : “Pulchra facie sed pulchrior fide” ? Enlaidissement et hiérarchie dévote au couvent.

9h55, Claudine Sagaert (docteure, Université de Toulon-Laboratoire Babel) : La laideur physique féminine à la Renaissance comme allégorie de la laideur morale dans les écrits littéraires, médicaux et religieux

10h35 : Pause

10h45, Livia Lüthi (doctorante, Université de Neuchâtel) : De la laideur des « retireuses de grâce ». Louise Bourgeois, ou la beauté d’être sage-femme

11h25, Roberto Romagnino (docteur de l’Université Paris IV-Sorbonne)  : Une beauté proprement « inhumaine » ? Portraits de femme dans la fiction narrative française au seuil du XVIIe siècle

12h05-13h35 : Déjeuner

13h35, Sofina Dembruk (doctorante, Universités de Goettingen-Paris IV-Sorbonne) : La laideron et la sainte : 
Laideur et enlaidissement dans L’Heptaméron (nouvelle X)

14h15, Paola Pacifici (docteure de l’Université Paris III-Sorbonne Nouvelle), Femmes poilues et à barbe dans la peinture de la Renaissance : pour une esthétique du merveilleux entre laideur et sainteté

14h55 – 15h05 : Pause

15h05, Diane Robin (docteure de l’Université Paris IV-Sorbonne), Erotique de la laideur féminine dans les recueils libertins du début du XVIIe siècle

15h45, Benoît Chêne (docteur, Université Grenoble II) : Élisabeth Ier d’Angleterre ou le refus de perdre la face : un corps soumis à la pudeur, au devoir de beauté et à la peur de vieillir

16h25, Olivier Chiquet (doctorant, Université Paris IV-Sorbonne-INHA) : La laideur au féminin dans la littérature artistique italienne de la Renaissance : du “vultus vetularum” d’Alberti à la vieillesse d’Hélène

17h05 : Clôture des débats

12 mars, amphi Chasles

Le corps féminin à la lumière du péché

9h, Lise Wajeman (Université d’Aix-Marseille-CIELAM), titre à venir

10h, Nadine Kuperty-Tsur (Université de Tel-Aviv) : La remise en cause de l’autorité protestante sur le corps et les cheveux des femmes par les intéressées elles-mêmes (1560-1598)

11h, Julien Centrès (doctorant, Université Paris I-Panthéon-Sorbonne-CRHXIX): Catherine de Médicis et Margot : Mutations des corps d’une femme de pouvoir et d’une femme de passion dans le film de Patrice Chéreau.

12 h, Pierre-Gilles Girault (Monastère royal de Brou) : Le corps de Marie Madeleine à la Renaissance, entre extase et rédemption


Maîtresses des ballet:
Anne Debrosse et Marie Goupil-Lucas-Fontaine

Les séances auront lieu les 9 janvier, 6 février, 12 mars 2016 de 10h à 13h, en Sorbonne, salle Paul Hazard

Cette session est le fruit d’une co-organisation entre Cornucopia et la SIEFAR (Société Internationale pour l’Etude des Femmes de l’Ancien Régime).

La vitalité des études sur le corps et les représentations qu’il suscite dans l’histoire, l’art et la littérature est particulièrement visible ces dernières années, comme en témoigne la parution des synthèses magistrales que sont l’Histoire du corps et l’Histoire de la virilité1. Il n’est pas étonnant par ailleurs que Judith Butler ait intitulé l’un de ses livres majeurs Des corps qui comptent : le corps est en effet au cœur des problématiques agitées par les études de genre.

Nous souhaiterions, au cours de cette session de séminaire, interroger la place du corps féminin à la Renaissance à travers trois angles d’approche qui doivent permettre le dialogue interdisciplinaire :

  • le corps des femmes en religion
  • la laideur féminine
  • le corps des femmes, objet de péché

La Renaissance est précisément la période où la prise de conscience de soi, de l’homme et de la femme en tant que persona pose la question de la place du corps dans la société, comme l’a montré Marie-Clarté Lagrée dans sa thèse sur la naissance de la « figure de soi » à la Renaissance. Lise Wajeman rappelle de son côté que les représentations d’Adam et Eve se multiplient, c’est-à-dire que la focalisation se porte sur le moment de la naissance et de la prise de conscience des corps dans leur différence sexuelle2.

« Souci de soi », « corps qui comptent », « corps des autres »… Selon H. Merlin-Kajman, il y avait quelque chose « d’un peu irrespirable dans [le] permanent éloge du corps » qu’elle ressentait dans le domaine des études féministes et de la recherche en général des années 19703. Elle explique qu’elle s’est intéressée au XVIIe siècle justement parce qu’il est l’inverse de la liberté du corps. De fait, à la Renaissance le corps, qu’il soit celui des hommes ou celui des femmes, constitue un objet de contraintes. La place du corps féminin en religion est symbolique de ces contraintes et des tensions qui touchent le corps, plus particulièrement le corps féminin. On pense aussi bien à l’enfermement conventuel qu’aux pratiques martyrologiques ou extatiques et du même coup quasi-libératoires d’une Thérèse d’Avila. Les controverses religieuses, constitutives de ce siècle, jouent également un rôle central dans ces interrogations sur le corps en général et sur celui de la femme en particulier.

Par ailleurs, s’il n’y a plus forcément de « permanent éloge du corps » dans les études féministes actuelles, ce dernier reste très (re)présent(é) dans la vie quotidienne comme dans la recherche, et même de façon croissante. Les publicités, omniprésentes, étalent sous nos yeux des corps stéréotypés. Lorsque l’on tape « corps des femmes » ou « corps féminin » sur un moteur de recherche, on trouve des textes, des images et des vidéos parlant de morphologie, de sexualité, d’attitude idéales, des dictats de la mode et des apparences, de rébellion nécessaire, de liberté du corps – donc de soi – à retrouver. Or, le corps des femmes à la Renaissance est considéré comme une variante nécessairement imparfaite du corps masculin, modèle de référence, que l’on retrouve aussi bien dans les planches anatomiques de Vésale qu’en peinture. Aussi nous intéresserons-nous à cet aspect imparfait du corps féminin et donc à la laideur féminine aussi bien dans sa dimension esthétique que morale.

Cette dimension morale conduit naturellement à poser la question du corps féminin comme image-même du péché : c’est ainsi qu’il a été traité lors des violences religieuses, comme l’a montré Denis Crouzet, pour qui, lors des massacres protestants comme catholiques,

le viol identifie la vérité de la femme, brise son masque de fausse pudeur, et fait brutalement ressortir son impudicité […] L’hérétique est adultère, et le rite sur le corps n’est pas un rite de dérision, il est sérieux, acte de révélation de l’immensité du péché de celles qui, en se détachant de l’amour unique qu’elles devaient à Dieu, ont donné leurs corps à Satan par amour de leur corps, se sont comme enlacées dans une étreinte amoureuse avec lui4.

Au-delà de la luxure, auquel le corps féminin est le plus souvent associé, nous souhaiterions poser la question des autres péchés capitaux que le corps féminin pourrait engendrer : gourmandise, avarice, envie, orgueil, colère, paresse sont autant de menaces auxquelles l’homme de la Renaissance est susceptible d’être confronté.

Les communications durent de 30 à 45 minutes maximum et sont suivies d’un débat d’une quinzaine de minutes, dont il est fait état par compte rendu sur le site de l’association Cornucopia.

La revue à comité de lecture Le Verger est susceptible, selon le souhait des intervenants, d’accueillir ces communications sous forme d’article, sous réserve d’approbation par le comité de lecture.

Les propositions de communication (une page environ) doivent être envoyées avant le 10 décembre 2015 par voie électronique à l’adresse site.cornucopia@gmail.com

Nous restons à votre disposition pour tout renseignement complémentaire et nous vous remercions par avance de votre collaboration.

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1A. Corbin, J-J. Courtine, G. Vigarello (dir.), Histoire du corps, 3 vol. Paris, Seuil, 2005 et Histoire de la virilité, 3.vol., Paris Seuil, 2011

2Marie-Clarté Lagrée, « C’est moy que je peins ». Figures de soi à l’automne de la Renaissance, Paris, PUPS, 2012 ; Lise Wajeman, La Parole d’Adam, le corps d’Eve. Le péché originel au XVIe siècle, Genève, Droz, 2007.

3Dans « Corps, émotion, lecture. Le “classicisme” pourrait ne pas être l’antithèse de la “modernité” », dans Corps et Interprétation, p. 49.

4Denis Crouzet, Les Guerriers de Dieu, p. 245-246, Seyssel, Champ Vallon, 1990.