Nina Hugot – Les songes tragiques à la Renaissance (1537-1583)

Cette section constitue la partie 8 de 9 du numéro
Bouquet XIX Le songe

Nina Hugot (U. de Lorraine – Metz)

Giuseppe Maria CRESPI, "Hécube aveuglant Polymnestor" (s.d.), Bruxelles, Musées Royaux des Beaux-Arts (source : WGA).

Giuseppe Maria CRESPI, "Hécube aveuglant Polymnestor" (s.d.), Bruxelles, Musées Royaux des Beaux-Arts (source : WGA).

Le songe, dont les deux formes principales en tragédie sont la vision de l’époux mort et la préfiguration symbolique du dénouement, est particulièrement présent dans les pièces, et constitue souvent un ajout par rapport aux sources. Ce motif semble être en effet profondément lié au fonctionnement du tragique. Une première analyse, assez intuitive, pourrait conduire à penser qu’il sert à marquer la fatalité du destin qui s’abat sur le héros. Néanmoins, comme l’a fermement démontré William Marx, il faut être prudent face aux définitions du tragique par la fatalité, tirées d’une analyse romantique des pièces antiques. De fait, en l’intégrant au genre tragique, les dramaturges modifient les données idéologiques du songe, puisqu’il y est nécessairement prophétique, vrai, et clair, même si les personnages concernés et/ou leur entourage n’acceptent pas toujours sa vérité. C’est que, si le songe permet en effet de marquer la fatalité qui s’abat sur le héros, il a peut-être plus fondamentalement comme objectif ou comme effet en tragédie de plonger le personnage dans l’épreuve qu’il va subir durant le temps de la pièce, puisqu’il l’informe sur ses malheurs à venir et permet donc de montrer au spectateur dans quelle mesure il va les accepter ou s’y opposer. Le songe constituerait dès lors une épreuve éthique, souvent nécessaire pour que le personnage fasse la preuve de son héroïsme : pour prouver sa grandeur face au destin, il faudrait l’affronter en connaissance de cause.

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Pour consulter le sommaire du bouquet du Verger consacré au songe à la Renaissance, on peut se reporter ici.

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